Storytelling : c’est la première impression qui compte

Au programme de ce mardi 1er juillet :

Storytelling : c’est la première impression qui compte

Le storytelling d’aujourd’hui est-il différent de celui d’hier ? Comment s’est-il adapté aux nouvelles tendances ? Quelles en sont les contraintes ?

Notre invité Laurent BRETT, fondateur de Brett & Company – la première société de création de génériques en France – nous raconte son parcours et la place qu’a pris le storytelling dans son métier.

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Plus jeune, Laurent a d’abord été sensible à l’univers graphique dans la musique. Pour lui, le graphisme de la pochette d’un album est déjà une première approche de l’univers de l’artiste. Elle est là pour mettre les gens en appétit. Les mangas ont également été une de ses premières sources d’inspiration. Il a ensuite effectué différents stages au sein de sociétés de production et de post-production. Il a ainsi appris à maîtriser des outils lui servant au montage et au trucage de films. Quelques années plus tard, il décide de quitter ce milieu. Il tente de passer à la réalisation de clips, mais c’est un échec : diriger une équipe, ce n’est pas pour lui. Il commence alors à faire du trucage, des effets spéciaux de clips et surtout il apprend a maîtriser After Effect.

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Il rentre chez Specimen Production où il conçoit le générique de La Beuze “avec des copains pour s’amuser”. C’est à ce moment là qu’il réalise que le générique de film est un des derniers endroits dans le cinéma où l’on est libre de pousser sa créativité. Pour lui, remettre de l’analogique dans le numérique permet d’offrir au spectateur une deuxième lecture du film. Travaillant directement avec les réalisateurs, il arrive à les convaincre qu’il peut tout gérer dans la création d’un générique : le montage, le trucage, la typo et le graphisme.

En regardant le film Seven de David Fincher, on se rend compte de l’importance du générique : ce générique présente un personnage malsain, très impressionnant, c’est une représentation qui va au delà même de l’histoire du film. Ce film a permis de redonner de l’importance aux génériques auprès des réalisateurs. Après avoir réalisé le générique de Nid de guêpes, le réalisateur Florent Sirit le prend sous son aile et l’emmène vivre l’aventure américaine.

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Pour le générique d’Hotage, Florent a entièrement fait confiance à Laurent. Son idée a été prise au sérieux et Florent lui a donné les moyens de la réaliser. L’idée de Florent était de créer une ambiance film noir avec de grandes ombres. Laurent était quant à lui dans une période Sin City ce qui collait parfaitement. Il créé alors son premier générique en motion design.

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Il rencontre ensuite Michel Hazanavicius et collabore avec lui sur OSS 117 Le Caire nid d’espions. Dans ce générique, le noir et blanc transitionne avec de la couleur. Le travail a été de rechercher des images qu’il pourrait transformer en graphisme et des costumes qui pourraient illustrer des personnages. Le storytelling pour Laurent tient dans l’idée du Jokari qui est un peu le fil rouge du générique et qui constitue une scène importante du film. Ce sont des codes visuels que l’on retrouvera plus tard dans le film. Il continue cette collaboration avec Hazanavicius en travaillant notamment sur le film multi-oscarisé The Artist.

Laurent Brett trouve dans son métier une certaine liberté : il peut produire de belles images avec peu de moyens. Il se dit aujourd’hui “content d’être libéré des contraintes publicitaires” grâce à la création de génériques.

Après nous avoir expliqué son parcours et sa passion pour la création de génériques et le storytelling, accompagnant ses propos d’illustrations et de vidéos de ses créations, Laurent a répondu aux questions de l’audience.

Le timing est-il une contrainte à la liberté d’expression ?
“Pour moi ce format n’est pas une contrainte. J’apporte ma vision du film, avec mon recul et j’apporte des idées auxquelles le réalisateur n’avait pas forcément pensé. Une fois le concept imaginé, cela devient une réflexion commune avec le réalisateur. Je n’ai pas le sentiment de subir une pression. C’est une mission de créatif avec un objectif marketing de vente. Je suis très épanoui dans ce format.”

Comment travaillez-vous la musique d’un générique ?
“Soit le score existe déjà, soit j’utilise des musiques déjà existantes du compositeur. Sur le film Otage, nous avons travaillé, le réalisateur et moi, sur des musiques différentes chacun de notre côté, et au final la musique du réalisateur a été choisie. Cela a très bien fonctionné également. Sur OSS 117, nous avions déjà une musique imposée, nous avons dû nous concentrer plus sur la rythmique. Le rapport entre l’image et le son est capital.”

A quel moment le réalisateur fait appel à vous pour la réalisation de son générique ?
“Il existe plein de cas de figure. A priori, nous intervenons environ trois semaines avant la fin du montage. Certains réalisateurs avec qui j’ai déjà travaillé m’envoient à l’avance leurs scénarios. Ce qui m’offre plus de liberté dans la création du générique. J’ai parfois l’opportunité de récupérer des images directement sur le tournage. Cela soulage le budget de la production.”

Y a-t-il des flops dans l’histoire du générique ?
“On va plus nous reprocher de faire un générique mieux que le film que le contraire. On ne peut pas réinventer ce que le réalisateur n’avait pas envie de voir dans ce film.”

Le générique de fin apporte-t-il de la valeur ?
“Selon moi, le générique de fin apporte de la valeur à un film qui n’a pas de générique de début.”

Faites-vous souvent appel à la 3D ?
“Dans ma petite structure on utilise beaucoup After Effect. Pour le reste nous sous-traitons. Je ne limite pas mes créations et s’il le faut je m’entoure des meilleurs. La 3D nécessite un process très lourd, je ne l’utilise que s’il y a une vraie raison de l’utiliser.”

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Dans la continuité des questions posées à de Laurent Brett, Olivier Saint-Léger a par la suite lancé un débat autour de quatre sujets :

Quelle place donnez-vous au storytelling et à cette première impression dans votre travail créatif ?
Pour Peter Gabor, il n’y a pas de création digitale : on raconte des histoires. Les marques sont obligées de raconter des histoires de manière plaisante. Les médias Internet poussent les marques à communiquer de cette manière là. Il faut faire appel à l’empathie vis à vis du public, à leurs émotions. Prenons l’exemple de Contrex et de son opération événementielle à Paris (la Contrexpérience 2 ndlr) où des jeunes femmes ont dû pédaler pour qu’un chippendale se déshabille : “C’est du pur storytelling !”

Quel est votre processus créatif pour réussir une “intro” efficace : générique de film, couverture de livre, page d’accueil d’un site…
Selon Geoffrey Dorne, nous sommes dans une économie de l’attention. Les marques cherchent sans cesse à capter l’attention du consommateur. Le storytelling, c’est raconter une histoire qui nous concerne nous en tant que consommateur, qui donne tout de suite une bonne impression et qui nous met dans l’ambiance. Cela peut passer par l’effet de surprise. Il faut capter l’attention.

Vivez-vous les codes visuels et culturels comme une limite ou un champ d’expression ? Quand faut-il casser ces codes ?
Les codes visuels ne sont pas une limite, selon Laurent Brett. Prenons l’exemple du film Attrape-moi si tu peux, le code visuel du générique n’a rien à voir avec celui du film. Pourtant, cela ne pose pas problème car ces codes sont propres à une même époque. Le générique arrive également à capter le rythme du film.

Quels sont selon vous les meilleurs exemples de succès dans ce domaine ?
Dans les séries américaines, le générique crée en quelque sorte un phénomène d’addiction. Le storytelling dans le cinéma est assez simple à réaliser. Les marques arrivent également à créer du storytelling en lançant par exemple une campagne de teasing annonçant un début d’histoire révélée par une seconde campagne de communication. Canal+ sait très bien le faire.

Après tous ces échanges, il était temps de continuer la conversation de manière plus informelle autour du buffet.

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Creative DrinkUp Adobe #2 au NUMA de Peter Gabor

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