Réinventer l’innovation : la formule gagnante
Si vous poussez les portes d’un service de création, vous verrez probablement tout un tas de personnes en train de plaisanter, de s’amuser ou de rêvasser, bref, de donner l’impression qu’elles n’ont rien à faire. Vous vous direz immédiatement : c’est un travail comme cela qu’il me faut.
En tant que directeur marketing du pôle Creative Cloud Mobile, je peux vous assurer que nous ne nous tournons pas les pouces. C’est ce que je répète à mon supérieur chaque fois qu’il nous rend visite et voit mon équipe perdue dans ses pensées. Cela fait partie du processus, mais je ne suis pas sûr qu’il me croit vraiment.
En fait, il m’a mis au défi de créer un processus dédié à la créativité. Il m’a demandé de trouver un moyen de reproduire et d’anticiper l’innovation, le tout d’un coup de baguette magique.
Non, là je vous fais marcher, mais la tâche m’a semblé bien ardue. Après tout, la spontanéité fait partie de la créativité. Comment étais-je supposé encourager la créativité en imposant à chacun de suivre un processus très strict ? Me demandait-on vraiment de réinventer l’innovation ?
Lorsque je me suis assis pour écrire ma lettre de démission, j’ai soudain été emporté par un souffle de créativité. Si l’innovation ne peut pas s’apparenter à un processus, il existe une formule que tout le monde peut appliquer :
Innovation = f(passion * vélocité* créativité* quelques variables) ^ risque
Cela n’a rien à voir avec la conjecture de Beal, donc inutile de sortir votre calculatrice. Pour inscrire l’innovation dans un processus reproductible, il ne faut pas chercher à prendre des mesures spécifiques. C’est plus une question d’attitude. C’est un peu comme fournir le bon produit aux bonnes personnes au bon moment. Pour passer de l’idée à la réalité, il faut maîtriser chaque pièce du puzzle.
Passion – La passion est une composante essentielle de l’innovation. Si les membres de votre équipe ne sont pas passionnés, c’est qu’ils se sont trompés de métier. L’invention consiste à créer quelque chose de nouveau. L’innovation modifie notre perception d’un produit. Inventer, c’est, par exemple, créer ces petits morceaux de plastique au bout de vos lacets, qui permettent de les nouer plus facilement (on appelle cela des aglets). Innover, c’est passer d’un simple téléphone à un iPhone et révolutionner les modes de communication. Dans un cas comme dans l’autre, vous répondez à un besoin, mais seule la passion peut vous mettre sur la voie de l’innovation.
Vélocité – En mathématiques, la vélocité est la vitesse à laquelle se produit un événement. Dans le domaine de l’innovation, c’est la vitesse avec laquelle on parvient à franchir tous les obstacles que l’on rencontre. Elle aide les équipes à tirer rapidement des enseignements de leurs erreurs et à rebondir. Si vous faites preuve de rapidité, vous pouvez partager vos idées librement et accueillir les commentaires des clients sans avoir peur que la concurrence ne s’empare de votre idée et commercialise un produit avant vous.
Créativité – Pour qu’elle soit spontanée, les entreprises doivent l’encourager. On ne peut pas demander aux créatifs de « sortir des sentiers battus » en les maintenant dans un espace confiné. La curiosité, l’imagination et la connaissance alimentent la créativité. Chacun de nous possède un potentiel créatif, mais si l’environnement ne permet pas de l’exprimer, nous nous robotisons. Certes, les robots peuvent faire un tas de choses, comme résoudre des algorithmes, assembler les pièces d’une voiture et même battre Ken Jennings au Jeopardy. Mais ils ne sont pas programmés pour innover. Les entreprises exigeant le respect de processus spécifiques doivent accorder un minimum de souplesse au personnel pour qu’il puisse libérer sa créativité et apporter des idées neuves.
Variables – Ces variables peuvent être sous votre contrôle ou lui échapper. Qu’il s’agisse de l’évolution du marché qui remet en question l’intérêt de votre idée ou des restrictions internes de votre entreprise qui compliquent sa mise en œuvre, vous devez tout simplement accepter de ne pas pouvoir tout contrôler et de ne pas totalement maîtriser le résultat final. L’important est de vous focaliser sur ce que vous maîtrisez et d’identifier ce qui est hors de votre portée, sans laisser ces éléments vous déstabiliser.
Risque – Connaissez-vous la différence entre un joueur compulsif et un joueur professionnel ? La réussite. Une joueur compulsif continuera à jouer, même après avoir tout perdu. Un professionnel sait qu’il n’y a aucune garantie, mais qu’on n’a rien sans rien.
Chaque initiative présente un certain niveau de risque. Ce dernier peut d’ailleurs être particulièrement élevé lorsque vous innovez pour bousculer des pratiques établies. Les gens, et plus particulièrement les actionnaires, se montrent souvent réfractaires à la prise de risques, mais pour innover, les entreprises doivent l’encourager et récompenser les preneurs de risques. Celles qui ne veulent prendre aucun risque sombrent dans l’immobilisme, l’antithèse de l’innovation !
Dans la formule que j’avance, tout dépend de la capacité à prendre des risques car, sans cela, il n’y a pas d’innovation. Sans risque, cet article serait écrit en hiéroglyphes, sur la paroi d’une grotte. Il n’est peut-être pas judicieux de mettre dans votre CV que vous avez le goût du risque et acceptez l’échec, mais cette attitude contribue de plus en plus à l’évolution de notre société.
S’il est vrai que l’innovation ne peut pas être planifiée, les entreprises peuvent la favoriser en favorisant une approche adéquate. En encourageant la créativité, elles pourront ancrer l’innovation dans un processus reproductible, mais ne pourront pas toujours l’anticiper.