Métiers du marketing : la mutation ne fait que commencer

L’automatisation des proces­sus dans le mar­ket­ing est une ten­dance forte. Mais au delà de l’automatisation sim­ple des tâch­es ou des work­flow, de nou­veaux out­ils tels que les learn­ing machines ou l’intelligence arti­fi­cielle com­men­cent à appa­raître. Suresh Vit­tal, Vice Prési­dent Stratégie et Mar­ket­ing Pro­duit pour Adobe Mar­ket­ing Cloud, nous a livré quelques pistes pour mieux percevoir les enjeux de ces tech­nolo­gies dans le marketing.

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Comment l’arrivée des learning machines et de l’intelligence artificielle va affecter le marketing et les marketeurs ?

Aujourd’hui, le mar­ket­ing a déjà recours à une par­tie de ces tech­nolo­gies. De nom­breuses cam­pagnes sont déjà mod­élisées dans les sys­tèmes actuels. Toutefois, ces proces­sus sont essen­tielle­ment basés sur des mod­èles appor­tant des répons­es à une sit­u­a­tion pré­cise et ils sont mis en place manuellement. A ce niveau on par­le plus de proces­sus automa­tisés. Les learn­ing machines, elles, per­me­t­tent de sor­tir de ce cadre et de pren­dre en compte des ensem­bles plus com­plex­es, avec une mul­ti­tude de nou­velles sources de don­nées. C’est un vrai chal­lenge pour les mar­ke­teurs tra­di­tion­nels qui avaient une approche ori­en­tée vers un mod­èle plutôt fondé sur des répons­es dans un con­texte pré­cis.

Les learn­ing machines cassent ce mod­èle clas­sique et vont beau­coup plus loin. Elles peu­vent par exem­ple servir à com­pren­dre un con­texte, met­tre en place des mod­èles pré­dic­tifs, aider sur le plan lin­guis­tique (quels mots utilis­er dans un envi­ron­nement par­ti­c­uli­er) ou encore tag­ger automa­tique­ment des con­tenus en fonc­tion de leur con­texte. Tout ceci per­met au mar­ke­teur de mieux choisir les act­ifs qui vont être util­isés dans une campagne.

Dans cette évolu­tion du mar­ket­ing, le rôle des Data Sci­en­tists est impor­tant dans l’organisation des don­nées. Toute­fois, ces derniers sont sou­vent très ori­en­tés vers les « algo­rithmes » alors que les mar­ke­teurs tra­di­tion­nels sont ori­en­tés vers la mar­que. Ils doivent donc tra­vailler ensem­ble mais le prob­lème aujourd’hui est que ces deux pro­fils ont sou­vent du mal à se com­pren­dre : les data sci­en­tists voient les don­nées avec une approche unique­ment « sta­tis­tique », alors que pour les mar­ke­teurs les don­nées ne sont qu’un levi­er qui aide dans les pris­es de déci­sions business.

Pour maitris­er pleine­ment l’environnement inno­vant qui émerge dans le mar­ket­ing, un nou­veau pro­fil doit pren­dre place entre le data sci­en­tist et le mar­ke­teur. En com­prenant par­faite­ment les besoins des deux vues méti­er, à la fois ana­ly­tique et busi­ness, ce pro­fil doit jouer un rôle de facil­i­ta­teur. Ce pro­fil est aujourd’hui cru­cial pour accom­pa­g­n­er la trans­for­ma­tion très rapi­de du marketing.

Qui va jouer ce rôle de coordinateur ?

Pour nous il s’agit d’un ingénieur mar­ket­ing. Il peut être un homme du mar­ket­ing clas­sique qui a un attrait très fort pour la « data », ou bien il pour­rait être issu du monde IT à con­di­tion d’avoir déjà une solide con­nais­sance du mar­ket­ing de l’entreprise. La créa­tion de pro­fils hybrides de ce type n’est pas nou­velle : dans la finance, par exem­ple, les années 90 ont vu émerg­er les ingénieurs financiers, dont le rôle était sen­si­ble­ment similaire.

Les entreprises ont encore du mal à trouver des data scientists alors où vont-elles trouver ces profils mutants ?

Nous sommes au tout début de ces nou­veaux métiers, et les pro­fils sont encore extrême­ment rares sur le marché. Il va fal­loir que de nou­veaux cur­sus péd­a­gogiques se met­tent en place, ce qui va pren­dre un cer­tain temps. La mon­tée en puis­sance de la don­née dans le mar­ket­ing va sans doute être un accéléra­teur très fort. Mais quoi qu’il en soit, il fau­dra atten­dre 5 à 10 ans pour voir une sta­bil­i­sa­tion de ces métiers sur le marché.

Olivi­er Saint Leger
Durant 20 ans, Olivi­er a tra­vail­lé pour les plus grands titres de la presse IT française. Au début des années 90, il rejoint les pio­nniers du Web et se spé­cialise dans les NTIC. Il écrit et traduit plusieurs ouvrages, fonde une web agency ain­si qu’une agence de presse, et lance le pre­mier mag­a­zine Inter­net français (Web//Master), suivi quelques années plus tard de .Net­pro. Ses sujets de prédilec­tion sont l’influence et la trans­for­ma­tion dig­i­tale. Sur Twit­ter : @saintleger