Expérience client : en avant toute !
Post rédigé par notre reporter Olivier Saint‑Léger.
Le marketing 2016 est sans aucun doute marqué du sceau de l’expérience utilisateur. Pour preuve, cette thématique rassemble : l’Adobe Summit, qui s’est tenu à Londres les 11 et 12 mai, a battu son record avec plus de 5000 visiteurs venus de 50 pays différents qui ont pu partager, échanger et participer à plusieurs dizaines de sessions, toutes (ou presque) étant consacrées au Graal de l’expérience utilisateur.
Si l’expérience utilisateur est replacée au centre de toutes les stratégies, c’est que les utilisateurs eux‑mêmes changent. C’en est bel et bien fini du marketing top down et des canaux de communications « historiques » dans lesquels les mêmes messages se répètent à l’infini. Comme le rappellent souvent les experts, les consommateurs ont pris le pouvoir. Ils ne veulent plus que l’on s’adresse à eux comme on s’adresse à leur voisin. Ils veulent une relation privilégiée avec leurs marques. Leurs attentes changent, et vite. Cette petite blague entendue lors du Summit en est un parfait exemple : « la loi de Moore a migré chez les clients, leurs attentes vont doubler tous les 18 mois ! ». Au-delà de cette boutade, l’impact pour les entreprises est considérable. Cette inversion de tendance va les pousser à ne plus penser et vendre des produits mais des expériences, et personnalisées si possible.
Cette nouvelle ère de l’expérience business est un nouveau challenge que doivent relever les entreprises. Comme l’expliquait Brad Rencher lors de sa keynote d’introduction, après une première vague dédiée au back office il y a 50 ans, une seconde vague consacrée au front office il y a une quinzaine d’années, les entreprises doivent aujourd’hui s’appliquer à solutionner la troisième vague de l’expérience utilisateur, qui est tout aussi complexe — voire plus — que les deux précédentes.
Alors comment tenter de la définir ? Quels en sont les fondamentaux ? Comment la mettre en œuvre ? Là encore, Brad Rencher propose une approche conceptuelle simple et efficace : l’expérience business, c’est l’art de connaitre et respecter le client, de lui parler d’une seule voix, de rendre les technologies transparentes et… de savoir surprendre. De l’aphorisme à la réalité, il y a un pas que les entreprises doivent franchir en se repensant, en se réorganisant et en innovant pour le plus grand bénéfice leurs clients.
Plusieurs chantiers doivent être menés de front pour bâtir cette expérience client. La première étape, bien sûr, sera une profonde réorganisation des différents services. Comme nous l’avait si bien dit John Travis il y a quelques mois, « Les clients se fichent de votre organisation ou de vos budgets : ils veulent une expérience client sans faille ». En l’occurrence, si l’expérience est bien l’objectif premier de toute stratégie, l’organisation des entreprises doit s’adapter pour qu’elle soit mise en œuvre. Il faudra alors faire en sorte que les différents points de contact soient intégrés et que leurs responsables travaillent de concert pour que la partition soit réussie. Autrement dit que le client soit satisfait, même si il faut pour cela casser des silos ou faire bouger les lignes de quelques territoires acquis de longue date. Cette mutation, d’ailleurs, pourra être facilitée par l’arrivée de « nouveaux » profils (Data scientists, Chief Experience Officer, Chief Content Managers, etc.)… si ils ne font pas face à une résistance trop forte des coeurs métiers déjà en place. D’ailleurs, on ne reviendra pas assez sur le rôle essentiel du CEO (et des RH) dans cet accompagnement, en ayant une vision affirmée du digital et être en mesure de « lisser » les territorialités entre les différents métiers de l’entreprise.
La composition même de cette expérience client est bien entendu l’autre grand challenge. Tout d’abord, il faudra faire face à la fragmentation des usages, des périphériques ou encore des canaux. Par exemple, une récente étude Adobe met en évidence qu’un client utilise en moyenne 6 périphériques et consulte 12 sources de contenus. Depuis un certain temps, la logique du mobile first semble s’imposer. Si ce périphérique est désormais totalement acquis pour les clients (il y a plus de smartphones que de brosses à dents par humain et 90% d’entre eux passent leur temps connecté à des apps plutôt qu’à un site web) les entreprises ont encore du chemin à parcourir puisque 34% d’entre elles n’ont pas encore défini clairement leur stratégie en la matière. Néanmoins, quelques exemples de transfert sont intéressants, comme le cas de Vodafone en Irlande qui, sous la pression des clients, utilise désormais la messagerie Whatsapp comme canal CRM avec un volume messages échangés désormais nettement supérieur à celui des SMS.
Et ce n’est sans doute pas fini car après la vague du mobile (et des tablettes dans une bien moindre mesure) il faut faire face aux interfaces intelligentes et connectées (ce qui est sans doute, je le concède, un pléonasme) puis bientôt à la réalité virtuelle. D’ailleurs, lors du Summit, Dunkin’ Donuts a eu l’occasion de faire une démonstration plus que convaincante débutant depuis un kiosque connecté pour finir dans l’IHM centrale d’une Tesla (dont l’apparition sur scène n’a pas manqué de surprendre).
Mais une bonne expérience c’est aussi et surtout une tonalité, un storytelling, bref des contenus. Selon Brad Rencher « pour les clients aient de grandes expériences, celles-ci doivent débuter avec un bon contenu ». Mais pour nombre d’entreprises, il est encore très difficile de dépasser la logique produit. Ce dépassement de la marque n’étant pas toujours compris par les équipes en place. Par ailleurs, les contenus se doivent de ne plus être uniformément poussés dans les différents canaux qui constituent le parcours client. Ils vont varier en fonction du temps, de l’endroit et du format choisi par le consommateur. De plus, leur forme pourra imposer une communication bilatérale et donc s’ouvrir à l’échange et à l’interaction (ces derniers devenant eux‑mêmes des contenus). Le pari pour les entreprises revient donc à gérer cette « content velocity » en adoptant les meilleurs pratiques et outils qui leur permettront de faire face à cette démultiplication des contenus.
Last but not least, il faut également prendre en compte l’arrivée massive des données issues de l’ensemble des dispositifs du parcours client, qu’il soit numérique ou non d’ailleurs. Pourquoi ? Pour répondre à ce qu’attendent principalement tous les clients : recevoir un message totalement personnalisé, qui correspond à ses attentes et qui remplit un réel service. Plus encore, les marketeurs doivent, via ces données ‑et avec l’accord de leurs clients- être en mesure de pouvoir prévoir ce dont ils vont avoir besoin avant même d’en avoir fait la demande. Il est certain que l’on reparlera ici du marketing prédictif parce que le meilleur moyen de prédire le futur, c‘est de le créer.