La transformation digitale n’existe pas

Dans le cadre de mes fonc­tions chez Adobe, je ren­con­tre beau­coup d’agences, de cab­i­nets de con­seil et de clients, du secteur privé comme pub­lic. Beau­coup d’entre eux me par­lent de trans­for­ma­tion dig­i­tale, expli­quant par ce terme que ce qu’ils sont est trans­for­mé, « dis­rup­té » même, par le développe­ment des out­ils dig­i­taux (mobile, tablette, bracelet con­nec­té, IoT, etc.). Lesquels out­ils vien­nent, de fait, pro­fondé­ment mod­i­fi­er les rela­tions humaines et les inter­ac­tions entre indi­vidus et organisations.

Cepen­dant, ce terme de trans­for­ma­tion dig­i­tale cor­re­spond sou­vent à un point de vue unique­ment tech­nologique, alors que j’observe chaque jour qu’il s’agit en fait d’une trans­for­ma­tion du man­age­ment, des organ­i­sa­tions, des inter­ac­tions : une pro­fonde rup­ture des silos organ­i­sa­tion­nels qui, de mon point de vue, devrait plutôt amen­er à par­ler de trans­for­ma­tion du mar­ket­ing et du com­merce par le digital.

C’est en cela que je dis que la trans­for­ma­tion dig­i­tale n’existe pas : ou, pour être plus pré­cis, que quand une trans­for­ma­tion dig­i­tale est mise en œuvre, elle n’est qu’une des facettes d’une trans­for­ma­tion plus glob­ale, plus longue aus­si, et dans laque­lle la tech­nolo­gie n’est qu’un pili­er. Impor­tant, struc­turant même, mais un pili­er par­mi d’autres.

Deux con­séquences majeures de cette transformation

Cette trans­for­ma­tion en pro­fondeur provoque deux con­séquences :

1- Le client reprend le pou­voir grâce à sa capac­ité d’information
Un client peut tou­jours chang­er d’entreprise, de four­nisseur, tan­dis que l’entreprise a tou­jours besoin de ses clients et ne peut pas en chang­er. Cette évidence, dev­enue encore plus forte avec la prég­nance du dig­i­tal, sig­ni­fie une néces­saire remise du client au cen­tre de toutes les préoc­cu­pa­tions de l’entreprise.

2- L’organisation des entre­pris­es doit être com­pléte­ment revue
En dépit de cette évidence, les entre­pris­es ne sont pas organ­isées pour met­tre le client au cen­tre, du fait de la présence d’importants silos organ­i­sa­tion­nels, et de fron­tières entre les dif­férents départe­ments. Or, la com­plex­ité de l’organisation ne doit pas affecter le client final. Il est donc néces­saire de com­mencer par adapter l’organisation des entre­pris­es, adap­ta­tion qui va en par­tie pass­er par la trans­for­ma­tion des out­ils tech­nologiques, et en par­ti­c­uli­er ceux néces­saires à la ges­tion des inter­ac­tions digitales.
J’insiste sur ce point, à des­sein : met­tre le con­som­ma­teur au cen­tre de son fonc­tion­nement n’est pas anodin. Il faut en com­pren­dre tous les impacts (tech­nologiques, humains, organ­i­sa­tion­nels, financiers, etc.) pour s’engager dans la voie d’une trans­for­ma­tion de l’entreprise. Puis, définir les dif­férentes étapes de ladite trans­for­ma­tion, dont l’étape technologique.

Cette trans­for­ma­tion est une muta­tion du mod­èle de rela­tion avec les clients et équiper l’ensemble de son staff de smart­phones ou refon­dre sa plate­forme Web, par exem­ple, ne peu­vent pas con­stituer de répons­es sat­is­faisantes à ces enjeux. Ce sont des éléments par­fois néces­saires mais bien insuffisants.

C’est en cela, pour con­clure et boucler ma boucle, que je dis que la trans­for­ma­tion dig­i­tale n’existe pas : la trans­for­ma­tion tech­nologique existe (elle est même indis­pens­able) mais c’est la trans­for­ma­tion du man­age­ment, du mar­ket­ing, de la ges­tion des ressources/relations humaines, des inter­ac­tions externes et internes qui sont la réelle trans­for­ma­tion. Et cela sera tou­jours long et douloureux…
De votre côté, quel est votre point de vue sur la trans­for­ma­tion dig­i­tale ? N’hésitez pas à don­ner votre avis au sein des commentaires !