Expérience client : et si les marketeurs s’inspiraient de l’UX du gaming et de Fortnite ?
Tribune rédigée par Christine Chagneau-Pancrazi
Adobe et le Social Media Club ont reçu Celia Hodent, ex-directrice UX d’Epic Games (éditeur du jeu vidéo Fortnite) et Fabrice des Mazery, Chief Product officer de Thiga et ex-Head of product de Deezer, pour discuter du rôle de l’UX design pour concevoir des jeux engageants, accessibles et qui challengent les gamers. Animée par Pierre-Olivier Cazenave, Délégué Général du SMC, la table ronde a permis de mettre en avant des exemples concrets pour identifier, personnaliser et fluidifier le parcours du joueur, et dont les marketeurs de toute entreprise souhaitant proposer une expérience client de qualité peuvent s’inspirer.
Le principe : chausser les lunettes de l’autre
La perception du joueur est subjective. Ainsi, Deezer a déterminé 5 personnages types différents (ceux qui écoutent du hard rock, ceux qui sont passionnés de classique…) qui ont chacun leur ressenti et leurs habitudes. Ce joueur a aussi un mémoire faible et une attention limitée d’après les études. Il incombe aux développeurs, susceptibles de ne pas tenir compte des subtilités et d’une appréhension différente par les utilisateurs, de résister aux évidences. Pour remédier à ces écueils, l’UX design enjoint à :
-Etre à l’écoute des besoins : itérations et études utilisateurs ont permis de détecter les besoins insoupçonnés lors de la conception de Fortnite mondialement connu.
-Parfaire la connaissance client : Celia Hodent explique que les équipes ont détecté les biais cognitifs pour que le modèle mental du produit soit aligné sur ce que l’utilisateur final comprend du jeu. Des buts lui sont assignés, il doit développer des compétences dans le jeu — comme construire un escalier pour s’évader — et doit savoir pourquoi.
-Améliorer la pertinence : dans Fortnite, les joueurs pris dans la bataille avaient tendance à oublier des données capitales. Le multitâche – soigner son personnage tout en continuant l’action — a donc été supprimé faute d’attention.
-Accroître l’utilisabilité : ergonomie, effets sonores et visuels ont été améliorés pour une meilleure compréhension de l’utilisateur. Dans Super Mario, le personnage affublé de pics sur le dos indique clairement qu’on ne peut lui sauter dessus. Dans Fortnite, des icônes ont été rendues plus compréhensibles pour un focus du joueur sur la tactique.
-Développer l’engagement : des “features” sont ajoutées aux personnages, pour que l’univers soit toujours plus immersif, fun, que les utilisateurs s’identifient, que leurs émotions soient sollicitées, que le “game feeling” s’accroisse. La customisation possible des personnages, leurs costumes ou pas de danse dans Fortnite en sont des exemples.
La bonne nouvelle : une utilisation possible dans d’autres secteurs :
-Les équipes formalisent leur recherche des causes de réticence du joueur : son enthousiasme moindre vient-il du fait qu’il ne se projette pas, qu’il ne ressent pas d’émotion, que les objectifs sont trop élevés ou au contraire non motivants ? La check list peut servir pour toute interaction avec le client dans d’autres domaines.
-Des éléments du jeu peuvent être insérés pour accroître fidélité et motivation : mécanismes d’identification, petit cadeau offert tous les jours, historique des classements… Zelda apprend aux gens à faire en faisant, et c’est ce qui happe d’emblée leur attention. Les phases d’“OnBoarding” rendant autonome et d’Endgame ont été reprises par Deezer.
Les mécanismes consistant à faire preuve d’empathie avec le joueur testé pour identifier les freins puis les corriger peuvent être utilisés dans de nombreux autres secteurs que celui du jeu. S’appuyant sur les sciences cognitives, l’UX design, qui augmente l’attractivité de toute interface avec le client, a de beaux jours devant lui.