L’éthique : un corolaire de la performance commerciale des marques

L’authenticité de sa prise de parole per­met aujourd’hui à une mar­que de créer une expéri­ence client et employé dif­féren­ciée. Mais il ne suf­fit plus à la mar­que de clamer son adhé­sion à cer­taines valeurs. Elle doit délivr­er des expéri­ences en adéqua­tion avec sa respon­s­abil­ité socié­tale, face à des con­som­ma­teurs de plus en plus sen­si­bles à son éthique.

Quel est le point com­mun entre la cam­pagne « Dream crazy » de Nike avec Ser­e­na Williams en vedette et une boite de lait estampil­lée « C’est qui le patron ? » ven­due 0,99€ en super­marché ? Elles font de l’authenticité la valeur clé de leur prise de parole. Les clients ne veu­lent plus être des con­som­ma­teurs « pas­sifs » : l’acte d’achat se trans­forme en un mar­queur d’engagement et d’adhésion à des valeurs com­munes avec la marque.

Trans­former l’acte d’achat en un acte éthique­ment responsable

Ce mar­ket­ing des valeurs est très présent aujourd’hui dans cer­tains secteurs : le mar­ket­ing sportif, qui s’appuie sur les valeurs pos­i­tives de l’engagement, de l’effort, de l’esprit d’équipe et même sur des sujets de société tels que le fémin­isme ; la cul­ture où de plus en plus d’entreprises asso­cient leur nom à une expo­si­tion ou au pat­ri­moine ; le mar­ket­ing citoyen avec le sou­tien aux pro­duc­teurs locaux et le “made in France” qui trans­for­ment l’acte d’achat en un acte de respon­s­abil­ité citoyenne ; ou encore l’agroalimentaire avec des pris­es de posi­tion sur la san­té et les pra­tiques alimentaires.

« Nous assis­tons à une con­som­ma­tion dif­férente de la vision con­sumériste. Les clients choi­sis­sent des pro­duits qui appor­tent quelque chose au niveau socié­tal », explique Hen­ry Peyret, Prin­ci­pal Ana­lyst chez For­rester. La notion de valeurs devient essen­tielle dans la déci­sion d’achat, si bien que les mar­ques veu­lent faire du mar­ket­ing des valeurs un critère dif­féren­ciant. Au risque de s’y per­dre : sans réelle éthique, ce mar­ket­ing ne résis­tera pas à l’exigence de trans­parence des con­som­ma­teurs. « _La com­mu­ni­ca­tion par les valeurs sup­pose engage­ment, authen­tic­ité et trans­parence, car les clients ne sont pas dupes. Les mar­ques col­lectent et analy­sent la don­née pour com­pren­dre les besoins des clients. Les clients utilisent les mêmes tech­nolo­gies pour analyser les com­porte­ments des mar­ques », _ajoute Hen­ry Peyret.

Met­tre en place une gou­ver­nance éthique de la don­née et de l’expérience

Il ne suf­fit plus à la mar­que d’affirmer des valeurs. Les expéri­ences client et employé doivent refléter les valeurs socié­tales et celles-ci sont par­faite­ment véri­fi­ables par le con­som­ma­teur. « L’expérience client passe par la capac­ité des mar­ques à créer de l’émotion. Elles doivent met­tre en adéqua­tion la rela­tion client avec leur respon­s­abil­ité socié­tale et les valeurs de l’entreprise », pré­cise Luc Dammann, Directeur Général South­West Europe chez Adobe.

La ques­tion de l’éthique est pré­dom­i­nante : les mar­ques doivent met­tre en place une gou­ver­nance éthique de la don­née afin d’avoir une stratégie respon­s­able de la data. En atten­dant le futur “GIEC de l’Intelligence arti­fi­cielle”, cer­taines sociétés com­men­cent d’ailleurs à se dot­er d’une charte éthique dans l’IA. Com­ment réc­on­cili­er éthique et busi­ness ? Grâce au partage de la data et à la transparence.

Aujourd’hui, un grand groupe ali­men­taire délivre 1 500 attrib­uts à un pro­duit. D’ici 5 ans, il en délivr­era 15 000. Les mar­ques vont devoir partager un vol­ume crois­sant de don­nées afin d’aider les con­som­ma­teurs à accéder à l’information et véri­fi­er l’adéquation entre la prise de parole et son com­porte­ment. « On va assis­ter à une explo­sion de don­nées que les mar­ques vont devoir partager pour que leur pro­duit puisse être noti­fié dans des appli­ca­tions spé­ci­fiques qui véri­fieront la cohérence entre le dis­cours de la mar­que et son com­porte­ment », pré­cise Hen­ry Peyret.

Plac­er l’éthique au cœur de son busi­ness mod­èle

Le “consomm’acteur” prend le pou­voir et cela peut aller jusqu’au boy­cott des mar­ques. Danone en a fait l’expérience au Maroc : pour avoir ven­du un lait trop cher par rap­port au pou­voir d’achat, le groupe a fait l’objet d’un boy­cott. Le résul­tat : un effon­drement de près de 45% de son chiffre d’affaires. Danone demande alors aux con­som­ma­teurs de définir le bon prix par rap­port à la qual­ité du lait. Son objec­tif ? Restau­r­er la con­fi­ance et main­tenir le lien qui unit la mar­que à son client en inté­grant à l’expérience de mar­que les notions de trans­parence, de prox­im­ité et d’authenticité. Der­rière la façade du mar­ket­ing des valeurs, l’enjeu porte sur la cor­réla­tion entre l’éthique de la mar­que et sa per­for­mance commerciale.