L’incontournable expérience client
- Billet rédigé par notre reporter Olivier Saint‑Léger
Cette année encore, j’ai eu la chance de participer à l’Adobe Summit à Londres, un événement qui prend une place de choix aux yeux des marketeurs européens. Pour preuve, cette édition a rassemblé plus de 6000 participants, avec notamment une croissance forte de l’écosystème partenaires, signe de l’adhésion de plus en plus importante des entreprises aux solutions Adobe. Une grosse évolution, donc, si l’on compare avec ma toute première édition en 2012 qui rassemblait un peu plus d’un millier de participants.
L’expérience client d’abord, et partout
« Aujourd’hui, pour conquérir un marché chaque entreprise doit se concentrer sur l’expérience client ». Le ton du Summit était clairement donné par Paul Robson, président EMEA d’Adobe, lors de sa keynote d’introduction. Si l’expérience est clairement le grand sujet du moment, son application est encore un challenge, mais qui va vite devenir une figure imposée. « Mettre le client au centre de de la stratégie business est encore un acte difficile, mais les entreprises qui s’attaquent à ce défi en tireront une réel bénéfice », soulignait Paul Robson.
Et dans la réalité, la complexité de ce recentrement impose de créer toujours plus de contenus diffusés au bon moment, au bon endroit et au bon format ; elle nécessite d’agir vite, dans un modèle qui s’approche toujours plus du temps réel ; et enfin elle requiert une personnalisation forte idéalement one-to-one, celle-ci permettant de booster les revenus et les interactions. Lors d’une session au Summit, un responsable de chez Amadeus soulignait ainsi que du contenu personnalisé proposé à un client de retour sur leur service permettait d’obtenir 4 fois plus de résultats pour remplir un formulaire et un taux de conversion 5 fois supérieur en matière d’engagement.
Bienvenue dans l’ère du CXM (Customer Experience Management)
Pour réussir ce passage vers l’expérience, il va falloir organiser sa mise en œuvre en formant les équipes, en modifiant les processus et en adoptant les bonnes technologies. Selon Rick Parrish, analyste chez Forrester, il y a six « compétences » qui doivent s’imposer pour la gestion de l’expérience : l’étude du client, la hiérarchisation, la conception, l’habilitation, la culture d’entreprise et la mesure. Une approche détaillée par Giselle Abramovich, Enterprise Thought Leadership chez Adobe, dans un de ses articles sur CMO.com.
La donnée, pétrole de l’expérience
Bien sûr, l’expérience n’est rien sans les données. Sans elles, point de personnalisation, de création optimisée ou même d’intelligence artificielle (IA). Tout, désormais, conduit inéluctablement vers un business qui passe par un modèle décisionnel « data-driven », car seule la donnée est en mesure de connaitre un client… et donc de lui proposer une expérience unique.
En la matière, d’ailleurs, Adobe a eu l’occasion de présenter son propre modèle DDoM, soit Data Driven business Model, par l’intermédiaire de Claire Darley, VP Digital Media pour l’Europe. Avec 80% de l’activité issue du numérique, comprendre comment utiliser les données pour générer des informations exploitables est essentiel. “Si vous ne construisez pas des expériences locales, pertinentes, opportunes et contextuelles, alors vous échouez”, expliquait-elle en session plénière. Selon elle, la recette appliquée par Adobe pour sa transformation et la mise en œuvre de son expérience client repose sur quatre points principaux : s’accorder sur une mesure globale ; casser les silos ; identifier une source unique de confiance ; et bien entendu replacer le client au centre de tout.
Pour Claire Darley, l’expérience unique de millions de consommateurs peut être optimisée, et dans un contexte multi-segments et multicanal, il faut désormais mélanger données, intelligence et action pour réussir. Mais si l’importance des données n’est plus à remettre en question, leur qualité ainsi que leur accès n’est pas toujours au rendez-vous pour les entreprises. L’idée d’une mise en commun de données anonymisées et qualifiées par plusieurs acteurs était attendue. Et c’est désormais chose faite avec l’annonce par Adobe d’ODI (Open Data Initiative) il y a quelques semaines. Lancée conjointement avec Microsoft et SAP, cette initiative propose des réservoirs de données communs (data lakes) pour le bénéfice de leurs clients. Ce qui devrait logiquement accélérer la mise en route de projets centrés sur les clients.
L’IA omniprésente
Sans surprise, et en toute logique, l’IA était omniprésente sur le Summit. En trois ans, Sensei — la couche IA d’Adobe – est devenue le socle commun de l’ensemble des solutions pour la production de contenus créatifs et d’expériences personnalisées. L’automatisation apportée par Sensei est désormais en mesure d’intervenir sur toutes les étapes du parcours clients, que ce soit pour la production de contenus personnalisés et adaptés aux différents canaux, la prédiction des comportements ou l’analyse des données. Cette intrusion extrême de l’IA dans les métiers est-elle destinée à remplacer l’homme ? Si le mythe perdure, il est peut-être toujours utile de lui tordre encore une fois le cou. D’abord parce que l’IA ne se compare en rien à l’intelligence humaine mais plutôt à une automatisation de tâches répétitives ou à un traitement massif de volumes très (trop ?) important de données. Bienvenue dans l’ère de l’homme augmenté, ou du moins des métiers augmentés, avec pour seul objectif de meilleurs résultats. Une preuve amusante de la nécessité absolue de l’homme dans les processus numérique ? La mésaventure d’Amazon avec la création de T‑Shirts par une « IA » voulant faire de l’humour…
Un impact évident sur les infrastructures
Pour finir, il est important de parler également infrastructure. Si beaucoup de technologies actuelles — et à venir – font beaucoup rêver les marketeurs, elles donnent également beaucoup de matière à réflexion pour les DSI. Complexes et gourmandes, elles ne peuvent souvent pas s’accommoder des équipements actuels. Les systèmes complexes d’IA, par exemple, auront bien du mal à décoller sans une remise à plat conséquente des systèmes d’information. En la matière, le mot de la fin revient à Abhay Parasnis, CTO, Adobe, qui soulignait à juste titre que « les systèmes historiques ne peuvent pas répondre aux exigences des expériences clients attendues, et ce quel que soit le secteur d’industrie ». Les architectes de systèmes d’information ont de beaux jours devant eux.