Reflets : L’iconographie des millennials
Les « digital natives » produisent et publient leur propre contenu. Qu’ils soient des stars du web ou des micro-influenceurs, ils ne suivent pas mais imposent les tendances. Retour sur leur mode de production, leur maîtrise des terminaux mobiles et les conséquences pour les marques et les images qui forcément en découlent.
Jamais sans mon smartphone ! Âgés entre 18 et 34 ans, les millennials sont des usagers ultra connectés et notamment sur mobile, qui représente pour eux une formidable ouverture sur le monde mais aussi un moyen d’expression et de communication à portée de main. Il y a quelques années, les millennials postaient des photos d’eux en mode selfie, tout sourire, abusant des filtres et des effets pour sublimer leur silhouette et le décor dans lequel ils se trouvaient. Aujourd’hui leurs photos montrent leurs exploits, leurs actions, leur vie en mouvement, leurs coups de gueule, leurs engagements et leurs croyances. Les images sont moins lisses, les filtres ont disparu, place à l’authenticité, au naturel et aux instants de vie illustrés comme des reportages. Finis les tableaux esthétiques lisses, place aux photos- témoignages existentielles.
« De nos jours, les millennials valorisent leurs expériences en images. Ils sont fans des vidéos en temps réel (story Instagram ou Facebook) ce qui prouve leur fort intérêt pour partager leurs moments de vie avec leur communauté », explique Hélène Ortola, DGA de l’agence Disko. « Face à ces puissants producteurs de contenus et véritables médias, les marques ont fait d’eux leurs influenceurs et ambassadeurs en enchaînant les collaborations ».
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LES MICRO-INFLUENCEURS, PLUS CRÉDIBLES, PLUS VÉRITABLES
« Nous sommes dans une ère où les images priment sur les mots car elles sont perceptibles immédiatement. Gros consommateurs et producteurs de contenus visuels, les jeunes de la génération Y sont des médias en puissance et notamment sur les réseaux sociaux qui proposent tous des outils permettant d’être créatif. D’ailleurs, la majorité des influenceurs et des blogueurs stars sont des millennials », déclare Sébastien Brocandel, président et directeur de création de l’agence Pschhh.
Les marques se sont vite aperçues du potentiel de ces médias et ambassadeurs en puissance et ne peuvent plus se passer d’eux. Un bon moyen aussi pour elles de passer à travers les adblockers. Si influenceurs et millennials constituent un duo gagnant pour les marques, 2018 a enclenché une tendance que 2019 conforte : les micro- influenceurs sont désormais plus courtisés que les stars aux plus de 1,5 million de fidèles. Selon une étude de Balistikart, les campagnes avec des micro-influenceurs ont un taux d’engagement de 60% supérieur à l’ensemble des influenceurs. Les meilleurs prescripteurs, ce sont eux puisqu’ils poussent 6,7 fois plus les followers à l’achat.
Bref, «_ ils inspirent confiance, paraissent plus authentiques, et développent une relation plus intime avec leur communauté_ », pour paraphraser Balistikart. Pas étonnant donc que près d’une grande marque sur deux préfère aujourd’hui collaborer avec eux.
Autres tendances, la transparence, façon Yuka pour savoir ce que l’on mange et Inci Beauty pour analyser la composition de ses produits cosmétiques. Sans oublier le test et la personnalisation, symbolisés notamment par la marque de cosmétique Seasonly qui produit des soins pour la peau sur-mesure avec un packaging nominatif ; ou encore le body positivism, en lien avec le mouvement du « women empowerment » incarné par Dove, Huda Beauty et Glossier, site e-commerce venu des États-Unis qui a redéfini les codes graphiques et visuels des cosmétiques dans le monde avec ses cinemagraphs et la mise en scène de ses produits hyper design.
Six tendances pour six nouveaux univers visuels ouvrant un nouveau champ créatif des possibles. Les visuels des millennials illustrent bien ce qu’ils sont : de leur jeunesse (années 90) à leurs intérêts et leurs combats en passant par leur quête de sens. C’est toute une culture et une mentalité qui sont exprimées en photos, avec du fond, mais aussi du fun !
Pour faire la pub auprès des 18-24 ans d’un nouveau parfum aux allures de bâton de rouge à lèvres avec le hashtag, Yes I am Pink First, Cacharel a sollicité 300 micro-influenceurs dont pas un seul ne compte plus de 50 000 followers. « Ils ont des voix plus affinitaires avec leur communauté que les mastodontes du Net. Ils sont crédibles et véritables. Dans le cas de ce parfum, on a pensé un objet qui correspond à leurs envies de faire des détournements créatifs », explique dans les Echos Laetitia Guizol, influence et social media manager chez L’Oréal Luxe France.
DES CRÉATEURS DE TENDANCES
Pas de doute, les codes des millennials font les tendances d’aujourd’hui. Les lister reviendrait presque à établir un cahier des charges de l’iconographie social façon millennials. Quelles sont ces six tendances ? Primo la street life – reprise notamment par les marques de luxe dans leurs défilés et la création de leurs produits comme Dior ou Louis Vuitton qui crée des skateboards avec la marque urbaine Supreme ; secundo la pop culture – à l’image de Walmart dans son spot publicitaire diffusé aux Golden Globes 2019 montrant entre autres la Batmobile de « Batman », la DeLorean de « Retour vers le futur », la « Mystery Machine » de Scooby Doo, la Coccinelle jaune de Bumblebee ; tertio le jeu – comme La Roche-Posay proposant à sa cible de devenir un « skin checker » de manière ludique sur son site pour faire reculer le cancer de la peau.
Pour en savoir plus sur la tendance Démocratie Créative, lisez sans plus attendre :
- Reflets : Vive la démocratie créative (vraiment) pour tous
- Reflets : Notre monde visuel est-il l’œuvre des créatifs ?
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